Mes mots rient

Écrits, songes et correspondances

Tag: La Vie

L’Hypotypose et la mort d’une étoile

par Olivier Ramonteu

J’ai vu les étoiles danser
et s’effondrer sur elles-mêmes
j’ai vu des souvenirs inonder l’océan
de larmes atlantiques et de tendresse morte
j’ai vu des galaxies s’embrasser lentement
jusqu’à la fin des siècles jusqu’à la fin des guerres
des météores sous les territoires nus
de corps abandonnés sur l’autel des mots
pleins de leurs cicatrices et de leurs larmes beaux.
Aux premiers pas du monde et de l’aube naissante
j’ai vu le spectre fou d’un dieu sans foi ni loi
chevaucher des nuages en riant aux éclats
j’ai vu des comètes sur l’écume du monde
s’approcher de planètes pour y semer la vie
y cultiver l’amour et en cueillir les fruits
puis s’éloigner au loin comme on quitte un abri
pour traverser la nuit et en trembler de froid
avant de revenir vers sa planète aimante
et s’écraser dessus dans un immense bruit
que l’immense univers traduira en silence.

 

Là où vont les vagues

par Olivier Ramonteu

La route et le soleil à l’abri des nuages
Ecrire, écrire encore à s’en vider les yeux
Vivre dans le creux de mes vagues à l’âme
Remplir mes poumons du sel de la vie
Traverser l’océan comme une houle hante
Les rêves de marins où baignent des rochers
Quelques chansons encore pour danser dans la nuit
Avec des étoiles dont j’ignore le nom
Quelques chansons encore pour danser dans la nuit
Et finir à genoux en leur criant ton nom
Me noyer tout au fond de rêves atlantiques
Puis surgir des flots comme un cavalier fou
Sur le dos ruisselant de monstres chimériques
A l’assaut vaniteux de ces moulins à vent
Pour tomber dans la boue vaincu par ces géants
Redresser son vieux dos et son pelis de loup
Avancer lentement comme on berce un enfant
Et ignorer ces plaies que l’on a aux genoux
Mourir, mourir encore et mourir mille fois
et puis revivre enfin, revivre à chaque fois
Mourir, mourir encore et mourir mille fois
vivre pour en finir, et pour n’aimer que toi

 

 

 

Ce soir là

par aucoindesmots

Ce soir là

Déjà dix minutes que nous marchons l’un à coté de l’autre. Je comble les vides formés par le silence. J’espère ainsi que cela me donnera la motivation pour combler le vide qui sépare ma main de la sienne. Je vois les mètres défiler, la porte de chez elle se rapprocher. Il est plus facile de faire un pas en avant que de faire un pas sur le coté. Déjà quelques semaines que le trouble devient perceptible. Plusieurs soirs que je la raccompagne chez elle et que je ne trouve pas la force.

Quand on ne sait pas, chaque centimètre qui nous sépare de l’être désiré est un câble au dessus d’un gouffre. Vais je tomber ou garder l’équilibre ? Quelques attentions, quelques réactions ont donné un peu de poids à mon balancier. Il m’était cependant incapable d’y trouver de l’assurance. En faisant un pas de coté, allais je trouver du vide où un pont stable ?

C’est la dernière ligne droite avant d’arriver chez elle, ce territoire connu qui a déjà vu plusieurs heures d’échange dans le froid de l’hiver. Plusieurs heures à préférer discuter en sautillant sur nos pieds plutôt que de nous quitter. J’aurai eu plus confiance, j’aurai pris ça pour une preuve d’intérêt, pour un début de quelque chose.

Ce soir, il faut que je me lance. J’ai toujours préféré être sûr de m’écraser plutôt que de ne jamais savoir si le parachute allait se déployer. L’incertitude d’être passé à coté d’un bonheur est pire que la certitude de ne pas le vivre.

Au pas suivant, je lui prendrais la main. Dans 3 portes, je vais la prendre par la taille. Je me maudis d’en être incapable, que ma main soit si lourde à bouger, peut être si lourde de conséquence dans ma tête.

Nous arrivons au dernier virage. Après, la circulation m’empêchera physiquement de me rapprocher, ou alors sur un lit d’hôpital. Il faut que j’ose. Il me faut pouvoir enlever le P qui est depuis trop longtemps devant le mot heureux.

Mon épaule force mon bras qui lui même force ma main qui par obligation, entraîne mes doigts vers sa hanche. J’essaie de faire croire à une main assurée, à une main qui sait ce qu’elle fait. La vérité est toute autre évidement.

Des secondes, des heures à guetter un mouvement, un sursaut, la première réaction, le premier réflexe qui dit tout. Son corps ne peut mentir à ce moment précis. Si elle s’écarte ne serait ce que d’un centimètre de moi, si elle avance un peu plus vite, je serai fixé.

Elle continue comme si de rien n’était. A peine troublée par mon audace. Il ne faut rien montrer, il faut faire genre « c’est cool, tout est normal ». Les femmes aiment cette assurance masculine alors que celle ci n’est souvent qu’une façade. Le timide n’a que très rarement la côte alors qu’il est souvent le plus tendre, le plus attentif une fois en confiance.

A ce moment précis, je passe d’un assurance feinte à une assurance réelle. Elle ne m’a pas rejeté, elle n’a même pas frémi. C’est que tout se passe bien. Je vais pouvoir l’embrasser. Ce sera en bas de chez elle avant de lui souhaiter une belle nuit. Ensuite je repartirai dans le froid extérieur mais bouillonnant de l’intérieur.

Voici sa porte. Ce soir nous ne resterons pas discuter. Il me faut juste concrétiser cet acte de bravoure, cette audace dont j’ai fait preuve au mépris de mille et un dangers imaginaires. C’est le moment.

Rempli de ce courage qu’offre un territoire conquis, j’ose. Ses yeux timides sont baissés. Elle sait évidement ce qui va se passer mais elle fait mine de ne pas en être consciente. Ma main sur son menton l’oblige à plonger ses yeux dans les miens. Je me veux rassurant. Je ferme les miens et m’avance.

Ce soir là, je l’ai embrassé.

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Rien de plus précieux

par Dr Awkward

Il n’y a rien de plus précieux à mes yeux, moi qui ne l’ai pas connu. Rien que je désirais plus fort au monde. Rien de plus fragile, de plus subtil, de plus indispensable… et je l’ai perdu.

Était-ce mauvais sort ou fatalité, malchance ou aveuglement ? Quel degré de sagesse fallait-il atteindre avant d’y croire ? Fallait-il renoncer ou attendre ?

Aujourd’hui que reste-t-il ? Des rêves brisés, des contraintes dont je me passerais volontiers, un quotidien plus fade que mes espoirs, et des pleurs qui toujours me perceront le cœur.

Mais ne nous épanchons pas sur les malheurs de cette existence, qui sait de quoi l’autre aurait été faite ? Les parallèles s’éloignent continuellement et entre elles ne règne que le vide.

Et puis j’y ai gagné, malgré moi. Les épreuves nous révèlent à nous-mêmes, écarquillant nos yeux sur le squelette de nos convictions, la circulation de nos bassesses, nos failles, nos forces. Elles apportent aussi relativité et confiance, soutien, sagesse.

J’ai découvert le goût de la vie telle qu’elle est, sa naïve banalité, ses bonheurs simples et indispensables, la magie au quotidien, les rêves aux pieds d’argile qui attendent dans l’ombre de nos vies.  Et il n’y a rien de plus précieux…

Passeurs de lumière

par Dr Awkward

Différents, nous sommes tous différents. De l’un à l’autre, et d’un moment à l’autre.

Que serait l’existence si nous avions tous les mêmes défauts, les mêmes qualités, les mêmes envies et les mêmes attentes ? Nos forces cumulées seraient inarrêtables, mais la monoculture de nos faiblesses nous mettrait à la merci d’un grain de sable bien (mal) placé.

Condamnés, nous sommes donc tous condamnés à subir nos différences. À chercher qui pourra compléter notre puzzle, à désirer sans retour. D’aucuns appellent ça le sel de l’existence —sans doute pour toute la sueur et les larmes qui en découlent. Mais nous avons bien mieux à faire qu’épuiser nos forces à contre-courant, vain héroïsme et piètre jugement.

Embrassons donc nos différences, nos singularités et la richesse de toutes nos nuances. Que l’abrasion de nos aspérités nous enflamme plutôt que de nous consumer, que la circulation des bonheurs et des possibles attentions nous trouve toujours prêts à donner —et à recevoir.

Soyons des passeurs de lumière.

Tout ne va pas si mal

par Dr Awkward

Tout ne va pas si mal quand ça va encore bien. On s’arrange on s’y fait, on se satisfait de ces pointes de fer qui nous taraudent les hanches, pauvres pantins perdus dans cette pantomime. Oh ! bien sûr on s’agace, parfois, pour un rien. Surpris nous-mêmes par la violence de ces jaillissements on rejette la faute, on s’enivre, on s’aveugle, pour ne pas voir que la grimace qui nous fait face est le miroir de nos lâchetés.

Car tout est là, étalé devant nos regards aveugles —l’œil perçoit mais l’esprit est crevé. Et on se perd, soi, à vivre ainsi comme une loque dont se moque le destin. Coquin de sort, à nos âmes désemparées que fais-tu donc subir ? Faut-il donc s’armer de patience, ou de cruauté, de tendresse ou bien, quoi, de légèreté ? Eh, comment faire quand le quotidien agite devant nous ses chiffons rouges, mène la danse par le bout du nez tandis que nous trébuchons têtus tâtonnants titubants, chercheurs d’or grattant la mauvaise montagne.

Qu’il est pénible et rassurant le droit chemin, difficile pourtant mais, moins. Alors marchons, marchons, nous arriverons forcément quelque part même si nous tournons en rond. Et c’est déjà pas mal, non ? L’espoir faiblit et plus on recule moins on ose sauter, nos habits empesés d’habitudes trop lourdes, de bonheurs qui nous enchaînent et nous font dire que… Tout ne va pas si mal.