Mes mots rient

Écrits, songes et correspondances

Tag: Espoir

L’Hypotypose et la mort d’une étoile

par Olivier Ramonteu

J’ai vu les étoiles danser
et s’effondrer sur elles-mêmes
j’ai vu des souvenirs inonder l’océan
de larmes atlantiques et de tendresse morte
j’ai vu des galaxies s’embrasser lentement
jusqu’à la fin des siècles jusqu’à la fin des guerres
des météores sous les territoires nus
de corps abandonnés sur l’autel des mots
pleins de leurs cicatrices et de leurs larmes beaux.
Aux premiers pas du monde et de l’aube naissante
j’ai vu le spectre fou d’un dieu sans foi ni loi
chevaucher des nuages en riant aux éclats
j’ai vu des comètes sur l’écume du monde
s’approcher de planètes pour y semer la vie
y cultiver l’amour et en cueillir les fruits
puis s’éloigner au loin comme on quitte un abri
pour traverser la nuit et en trembler de froid
avant de revenir vers sa planète aimante
et s’écraser dessus dans un immense bruit
que l’immense univers traduira en silence.

 

Ce soir là

par aucoindesmots

Ce soir là

Déjà dix minutes que nous marchons l’un à coté de l’autre. Je comble les vides formés par le silence. J’espère ainsi que cela me donnera la motivation pour combler le vide qui sépare ma main de la sienne. Je vois les mètres défiler, la porte de chez elle se rapprocher. Il est plus facile de faire un pas en avant que de faire un pas sur le coté. Déjà quelques semaines que le trouble devient perceptible. Plusieurs soirs que je la raccompagne chez elle et que je ne trouve pas la force.

Quand on ne sait pas, chaque centimètre qui nous sépare de l’être désiré est un câble au dessus d’un gouffre. Vais je tomber ou garder l’équilibre ? Quelques attentions, quelques réactions ont donné un peu de poids à mon balancier. Il m’était cependant incapable d’y trouver de l’assurance. En faisant un pas de coté, allais je trouver du vide où un pont stable ?

C’est la dernière ligne droite avant d’arriver chez elle, ce territoire connu qui a déjà vu plusieurs heures d’échange dans le froid de l’hiver. Plusieurs heures à préférer discuter en sautillant sur nos pieds plutôt que de nous quitter. J’aurai eu plus confiance, j’aurai pris ça pour une preuve d’intérêt, pour un début de quelque chose.

Ce soir, il faut que je me lance. J’ai toujours préféré être sûr de m’écraser plutôt que de ne jamais savoir si le parachute allait se déployer. L’incertitude d’être passé à coté d’un bonheur est pire que la certitude de ne pas le vivre.

Au pas suivant, je lui prendrais la main. Dans 3 portes, je vais la prendre par la taille. Je me maudis d’en être incapable, que ma main soit si lourde à bouger, peut être si lourde de conséquence dans ma tête.

Nous arrivons au dernier virage. Après, la circulation m’empêchera physiquement de me rapprocher, ou alors sur un lit d’hôpital. Il faut que j’ose. Il me faut pouvoir enlever le P qui est depuis trop longtemps devant le mot heureux.

Mon épaule force mon bras qui lui même force ma main qui par obligation, entraîne mes doigts vers sa hanche. J’essaie de faire croire à une main assurée, à une main qui sait ce qu’elle fait. La vérité est toute autre évidement.

Des secondes, des heures à guetter un mouvement, un sursaut, la première réaction, le premier réflexe qui dit tout. Son corps ne peut mentir à ce moment précis. Si elle s’écarte ne serait ce que d’un centimètre de moi, si elle avance un peu plus vite, je serai fixé.

Elle continue comme si de rien n’était. A peine troublée par mon audace. Il ne faut rien montrer, il faut faire genre « c’est cool, tout est normal ». Les femmes aiment cette assurance masculine alors que celle ci n’est souvent qu’une façade. Le timide n’a que très rarement la côte alors qu’il est souvent le plus tendre, le plus attentif une fois en confiance.

A ce moment précis, je passe d’un assurance feinte à une assurance réelle. Elle ne m’a pas rejeté, elle n’a même pas frémi. C’est que tout se passe bien. Je vais pouvoir l’embrasser. Ce sera en bas de chez elle avant de lui souhaiter une belle nuit. Ensuite je repartirai dans le froid extérieur mais bouillonnant de l’intérieur.

Voici sa porte. Ce soir nous ne resterons pas discuter. Il me faut juste concrétiser cet acte de bravoure, cette audace dont j’ai fait preuve au mépris de mille et un dangers imaginaires. C’est le moment.

Rempli de ce courage qu’offre un territoire conquis, j’ose. Ses yeux timides sont baissés. Elle sait évidement ce qui va se passer mais elle fait mine de ne pas en être consciente. Ma main sur son menton l’oblige à plonger ses yeux dans les miens. Je me veux rassurant. Je ferme les miens et m’avance.

Ce soir là, je l’ai embrassé.

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La nuit de l’âme

par Dr Awkward

Sombre est la nuit de l’âme
Où se noie toute parole
Et le geste inutile
D’un ami repoussé.

Dans l’étau de ses griffes
L’abandon pour seule issue,
Naufragé de l’espoir
À tous les vents perdus

Car tes larmes stériles ne tarissent
Ni la source ni la plaie
D’où le poison distillé
S’écoule dans tes veines.

Ô bateau ivre de brûlante solitude,
Brisant brisé solitaire et sans but,
Ombre parmi les ombres,
L’infini horizon pourtant se peut approcher.

Et si nul répit ni douceur ne sont à espérer
Nectar trop subtils que ton corps vomirait
Embrasse plutôt et la douleur et les larmes
Alliés blessants que tu t’es attitré

À ton corps et ton âme défendant
À bras-le-corps et à cris s’il le faut
Tord le cou de cette vaine rancœur
La rengaine stérile qui te meurtrit le cœur.

La forêt et la mouette

par Olivier Ramonteu

Ça fait haut quand même, vu d’ici. 300m de falaise, comme un prolongement de mes jambes. 300m de vide dont le silence semble battre contre ma poitrine. Je ne suis même pas sûr de ce que je vois tout en bas, avant la cime des arbres. Est-ce un rocher de granit ? Un peu de terre et de graviers ? L’arête aiguë du roc ? Quel contraste avec cette grande mer verte qui ondule langoureusement au gré d’un vent chaud et lent ! Qu’elle semble calme et bienveillante ! Si je prenais assez d’élan, peut-être parviendrais-je à l’atteindre pour finir absorbé dans ses grands bras aimants, sentant le pin et la lavande.

Je sens comme un picotement au bout de mes pieds. Comme si quelque chose voulait sortir de moi par cette extrémité de mon corps. Je les sens frotter la terre meuble et je vois quelques cailloux tomber lentement le long de la paroi et disparaître infiniment minuscules et sublimes. Au-dessus de moi, une mouette tourne en rond. Je la sens. Je l’entends battre des ailes puis disparaître dans l’immensité arctique de l’azur.

Une main se pose sur mon épaule. Je souris.